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 Quand vient la nuit - Partie II

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2 participants
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Arlequin
Fou du Roi .....Tac)
Arlequin


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MessageSujet: Quand vient la nuit - Partie II   Quand vient la nuit - Partie II EmptyDim 15 Oct - 11:19

Les gouttes de larmes


Le temps passe, les jours, puis les semaines, les mois qui se suivent laissant derrières eux, la trace indélébile d’un amour platonique apogée de la passion ; des regards échangés, des mains qui se touchent du bout des doigts, des mentons qui se chatouillent, des joues qui s’effleurent, un doigt posé sur la certitude de ne plus être seul.
Et ces deux là, se regardent, ils ne se quittent plus. Le jour, ils croisent le fer, d’une chasse à l’autre ; la nuit, ils se contemplent, discutent de tout de rien, peu leur importe, ils sont ensemble et c’est ce qui compte. Quant au reste, ils s’en accommodent. En tout cas, ils essayent ou ils font semblant.

Mais ce fardeau, ce terrible fardeau qui pèse un peu plus chaque jour...
Au début, ils se contentaient d’un même regard, d’un sourire, et puis, de ces petits gestes échangés, de ces attentions particulières, de ces baisés volés au détour d’un chemin ou au coin d’un feu. Au début, oui.
Et puis… Et puis, vient le temps où les regards ne suffisent plus, le temps où l’effleurement réclame autre chose, le temps où ne pas se toucher devient un déchirement. Et la braise, qu’ils regardent lentement s’éteindre du fond de la nuit, elle leur paraît maintenant si froide quand leurs mains se tiennent. Les flammes ne brûlent plus du feu, mais elles embrasent leurs corps et leurs cœurs voudraient pour un temps, cesser de s’enlacer, et laisser enfin, leurs ventres brûlants s’emmêler.

Peu importe, leur destin est scellé, ils ne se toucheront jamais autrement que comme deux enfants le feraient. La pudeur imposée est devenue leur chemin de croix et ils se mentent, ils n’osent se regarder parce que le désir est là, en chacun d’eux. Cette irrépressible envie de s’enlacer autrement que dans leurs yeux. Et ce désir, ce désir si fort, si puissant qui naît à chacun de leur regard ; à chaque frôlement, il grandit encore, et à chaque souffle de l’autre, le désir emporte leurs corps.

Et pourtant.

*
* * *
*



Lui a retrouvé son âme d’enfant heureux, et son visage a repris un sourire d’enfant, insouciant et espiègle ; lorsqu’il la voit, sont regard prend les lueurs du temps, le temps d’un sourire, d’un regard en coin, d’un clin d’œil.
On pouvait les entendre rire, au travers des feuillages et les ombres de la colère se mirent à valser sur leur chemin. Et elle, belle, ses yeux profonds et que lui ne cesse de contempler, il s’y voit si beau, dans ses iris ébène.

Et malgré les stries qui griffent son visage, le masque de guerre du Hellequin s’estompe peu à peu, pour lui rendre son masque de bouffon ; Arlequin saltimbanque, jongleur des mots et des verbes, si bavard parfois, tellement amusé des précieux ridicules et séducteur de toutes les femmes. Pour un soupçon de son sourire, je veux dire le sien, celui de Boadicea, alors oui, son sourire de bouffon en habit de soie blanche, illumine son regard devenu morne hier.

D’un jour au suivant, il aurait pu oublier l’œuvre du Faucheur, il aurait pu reprendre son habit de foire et d’imitation du trône des rois bedonnants, reprendre les foules d’un verbe enjôleur et faire danser l’épouse d’un ventripotent, dupe et approbateur malgré lui. D’un salue princier délibérément exagéré, il aurait une fois de plus usurpé un rôle, puis un autre, peut-être le vôtre, lecteur crédule ou bien celui d’un troll trop abêti pour en apercevoir la tromperie ; moqueur et taquin, Arlequin aurait pu redevenir l’emprunteur du costume de ses garants du pouvoir et faire rire et sourire de leur ridicule.

Et on l’aurait applaudit, au lieu de craindre la légende des Hellequins.

Mais l’histoire du diable fou, enragé des haines et bouffé des colères venues d’ailleurs, ne s’arrête pas ici, et le destin sournois et cruel s’est une fois de plus interposé, durement, douloureusement et le cri que tous purent entendre, il n’était pas de rage, non, pas cette fois ; ce cri qui déchira la nuit comme un souffle terrifiant, ce cri qui embrasa l’obscurité et ses torpeurs, il était fait du désespoir, d’un désespoir si infini que nul n’aurait pu rester dans l’indifférence.

Et cette nuit, il a hurlé si fort du désespoir.

Il a couru longtemps. La forêt fut le témoin de sa douleur, et chaque branche semblait s’incliner sur sa course, comme si sa souffrance était suffisante ; ne pas ajouter à plus de blessure ; les arbres et leur majesté s’effaçaient et lui courait sans espoir, le visage bardé de lourdes larmes, les yeux perdus dans l’immensité du vide des espoirs trahis.

A bout de force, il s’est écroulé sur le sol humide et froid, un paysage qui lui est familier. Il n’a plus bougé. Le visage couvert de boue, les lèvres entrouvertes, le souffle court et l’haleine vaine, les yeux sans l’envie de voir ; il rêvait son visage, le visage de Boadicea. Comme une goutte de larme qui grossi au coin de son œil, faisant briller son regard, et puis, qui s’échappe pour lui ôter la lumière, glisse cruellement sur sa joue devenue de marbre, laissant derrière elle la cicatrice du désespoir.

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Boa
Esprit de croupe et Dame de coeur
Boa


Féminin Nombre de messages : 4359
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Jeu : On my own
Race : Centaure OFF / Humaine ON
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MessageSujet: Re: Quand vient la nuit - Partie II   Quand vient la nuit - Partie II EmptyDim 15 Oct - 23:37

Ses yeux sont fermés, ses paupières palpitent, ses mains s'ouvrent et se ferment et ses épaules sont agitées de petites crispations convulsives... Parfois sa bouche s'entrouvre, sa lèvre s'étire comme pour crier. Mais rien ne sort qu'un infime gémissement, presque inaudible... Son rêve est peuplé de morts, noyé de sang, déchiré de cris. Un cauchemard parmi les autres...

Un temps ces songes horribles l'avaient laissée tranquille, ils avaient reflué vers les coins sombres de son âme, ils avait reculé, craintifs, devant la flamme pure et brillante qui s'était mise à éclairer tout son être. Cachés, enfuis, chassés par le sourire lumineux d'Arlequin, présent dans son esprit jusqu'au coeur du sommeil.

Il est toujours là, bien présent. Toujours aussi lumineux, radieux, ce sourire. Sauf qu'à présent il la brûle et la déchire. Et les songes noir reviennent à la charge, en pleine lumière, plus horribles encore car chacun d'eux est plus net, plus évident. Quand ils parviennent à s'emparer de lui et à se jouer de son image, il lui arrive, à son réveil, de souhaiter la mort...

Cette nuit, c'est l'un de ces rêves-là. Je plonge une lame sombre dans le coeur d'un homme inconnu, folle de rage et de haine pour son regard fuyant, sa lippe pendante et son ventre flasque de lâche trop nourri. Je lacère les chairs vivantes et pourtant déjà aussi molles que si elles étaient putréfiées. Et j'aime ça. Une exultation sauvage bouillonne au creux de mes reins, une sensation intense de satisfaction presque sexuelle, à la vue de ce déchet vivant, cette verrue ignoble arrachée enfin de la face du monde...

Puis le visage change. Le cheveux gras, brunâtre, s'allonge, s'assouplit, s'éclaire jusqu'à ressembler à de la soie blanche. Le visage grossier s'affine, les traits se précisent, les yeux ouverts perdent leur nuance glauque bordée de rouge. Ils cillent plusieurs fois, quand ils se rouvrent et me fixent ils sont devenus du brun chaud, pailleté d'or, que je connaîs, et que je chéris...

Ma main lache la poignée de la lame. Le corps devenu mince et plus grand s'affaisse devant mes yeux, alors que les yeux s'éteignent et que la vie le quitte sur un cri de souffrance...


Elle s'éveille en sursaut, le visage baigné de larmes, le corps en sueur et parcouru de spasmes... Elle halète convulsivement, chaque souffle achevé sur un râle. Elle couvre son visage défait de ses deux mains tremblantes. Agenouillée sur le sol, elle se courbe jusqu'à poser son front sur la terre battue de son refuge... Un long gémissement lui échappe, aigu, désespéré...

Comme j'ai besoin de toi à présent... Comme j'ai besoin que tu me serres dans tes bras, de toutes tes forces... Je n'en peux plus... Je n'en peux plus de ces moments où cette étincelle maudite jaillit dans nos regards, et où tu éloignes ta main, ou moi la mienne. Je hais cette vibration qui naît là en bas dans mon ventre, ce trouble qui me fait trembler, qui m'oblige à partir, à te laisser au bas de cet escalier que je ne pourrai jamais gravir sans me rompre le cou. Je hais ce geste presque automatique, quand je quitte les murs de la forteresse et quand je lève les yeux presque malgré moi, pour apercevoir la lumière qui brille au sommet de ta tour. Je hais... Je me hais.

Je me croyais plus forte que ça. Plus forte que ce corps maudit, ce corps femelle qui clame, qui hurle, qui exige. Je pensais que mon esprit et mon coeur pourraient le vaincre, ce ventre animal. Le mater. Le forcer à accepter sa vassalité, à se soumettre. Mais non. Il se rappelle à moi vingt fois par jour, cent fois, à chaque regard trop long, à chaque effleurement trop précis. Il suffit de rien. Un reflet sur tes lèvres. La courbe d'une mèche de cheveux, l'ombre qu'elle jette sur ta joue à la lueur du feu... Un rien, et je flambe...

Des nuits comme cette nuit, l'horreur de ce que je suis devenue se mèle à celle de ce que je vais devenir. Je croyais que ça ne pouvait pas être pire... Meurtrière torturée de remords, et à présent meurtrière torturée de remords, de désir et de honte. Je suis centaure, nom de Dieux, centaure ! Qu'ai-je été m'amouracher d'un humain ?


Les cheveux restent dans ses poings crispés. Les épaules secouées de sanglots, elle garde sa position ployée et douloureuse de pénitente.

Et se redresse brusquement.

Un cri. Son cri. Le cri de mon rêve.

Immobile, tendue, elle écoute.

Encore. C'est lui. Des branches cassées. Par là.

Elle bondit sur ses pieds, empoignant son arc au passage. Quelle que soit la créature qui s'est attaquée à lui, elle n'en laissera pas un bout attaché à l'autre. Presque silencieuse, elle s'élance dans ce bois qu'elle connaît par coeur. Elle saute les troncs tombés et les buissons qui pourraient entraver sa course, elle évite sans même y penser les plaques rocheuses dont le bruit sous ses pieds pourrait la trahir. Une flèche encochée, elle surgit dans une petite clairière, et se fige.

Une tache blanche sur le sol. Sa chevelure répandue. Où est l'autre ? Personne. Rien que lui. La clairière est déserte. Il ne bouge pas, mais il respire. Blessé ? Mourant ? Non ! Non...

Un bond de plus et elle est auprès de lui, l'arc tombé au sol, inutile, oublié. Elle se jette à genoux à côté de lui, passe ses mains fébriles sur son dos, ses hanches, tire sur une épaule pour le retourner, tâte son torse et son ventre, cherche la moiteur du sang sur lui, mais rien, rien, il est indemne... Le soulagement chante dans sa poitrine. Il n'a rien... Il n'a rien...

Ses cheveux masquent son visage. Je les fais glisser d'un geste, je découvre ses yeux presque clos, une trace de boue sur son front et sa pommette... Je frotte doucement la trace, j'attire à moi sa tête, je l'amène contre moi, sur ma jambe pliée, contre mon ventre, je l'enserre de mes bras, je la berce... Il n'a rien... Il n'a rien...

Mais que fait-il allongé ici, alors ? Le soulagement s'éteint... Je passe la main sur son front, sa tempe, le long de sa joue. Je cherche ses yeux. L'anxiété m'interdit autre chose qu'un murmure...


- Arl... Qu'est-ce qui s'est passé ?... Qu'est-ce que tu as ?
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