[Les Ithryn Luin]
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 Il court

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Sin
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Sin


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MessageSujet: Il court   Il court EmptyJeu 23 Aoû - 13:14

Il court, il court, il galope, il fend la bise, flèche brune dans un ciel gris. Où va-t-il ? Vers un but connu de lui seul, perdu dans les méandres de ses pensées, peut-être même ne sait-il même pas vraiment ce qu’il fait. Son carquois ballotte sur son dos, bercé par le fracas ininterrompu de ses pieds sur le sol, rythme régulier, presque envoûtant. Personne ne le poursuit, et il ne poursuit personne, il va, point final, point initial. Son esprit est sa seule compagnie lors de sa chevauchée fantastique. Il vagabonde de ci, de là, gauche, droite, haut et bas, slalomant entre les visages qui font son quotidien, entre les lieux qui animent ses journées, entre les sensations mille fois éprouvées ou mille fois espérées.
Des têtes, des corps, qui s’assemblent, qui se cherchent. Pourquoi cette confusion, pour un héros ordinaire comme lui, vivant en assemblée restreinte ? Parce qu’il n’a nul besoin de connaître plus de monde pour que son cerveau soit comblé. Il ne juge pas au nombre, mais à la valeur des cœurs.
Une image capturée, une personne reconstituée, enfin, alors qu’il évite de justesse de percuter un papillon jaillissant de derrière une souche. Quelle est-elle ? Elle est petite, mais cela n’empêche pas ses oreilles de fièrement pointer vers le ciel. Ne pas la juger sur la première impression, ni sur la taille, ni sur l’expérience. Maints esprits prétendument matures feraient bien de s’incliner devant la langue agile et les mots de soie de cette ensorceleuse en herbe au caractère bien trempé.
Puis tout se brouille de nouveau, un bruit se fait entendre, il faut accélérer la marche, précaution de plus, car le centaure sait qu’il est déjà rapide. Au détour d’un tronc épais, il se retourne, rien à voir, son avancée reprend, plus tranquille, pendant que le second visage accapare son esprit. Un bien beau visage, un visage qui se cherche, qui finira par se trouver, il le sait. Pour l’heure, c’est essentiellement un visage gentiment moqueur lors des joutes verbales plus ou plutôt moins enflammées, et un sourire toujours tapi derrière ses réparties moqueuses. Un visage séduisant, nul besoin d’être une femme pour l’apprécier, quoi qu’on en dise. N’est-ce point le reflet de l’âme ? Pourquoi se réduire aux yeux ?
Gauche, droite, terrain accidenté, cahin-caha, il maintient son rythme, mais de nouveau, dans sa tête, le fil se rompt, et tout se brouille. L’agitation extérieure qui mélange l’intérieur. Puis un trait blanc se forme, il le suit, et se retrouve sur une tête, une tête bien remplie, qui cache un véritable tempête émotionnelle, un esprit exalté, qui éprouve toute sensation cent fois plus fort que tout un chacun. Comment le définir ? Tordu ? Certainement, et ce n’est pas un défaut, avec des pensées rectilignes, on crée un monde uniforme. Fou ? Peut-être, lui-même le dit. Humain, c’est sans doute le plus simple et le plus beau des compliments qui puisse lui être fait.
Prise d’appuis et détentes se succèdent, un véritable piège de racines, le centaure est entouré d’arbres majestueux, aux troncs centenaires, solides, présence rassurante. Cette fois, c’est une brume qui apparaît derrière ses sourcils, elle se condense et forme une grande robe, couleur douteuse et sans importance. L’habit ne fait pas le sorcier, ni les tours de passe-passe, ni la vie d’ermite dans les lieux où pullulent vermines et insectes. Tout est dans l’esprit, dans le savoir et la manière de le présenter, de l’utiliser à bon escient, pour instruire et échanger, et non pour fabriquer son propre piédestal à force de vanter sa culture et ses capacités. C’est pour cela que sous cette robe se cache un véritable sorcier, pour cette humanité.
Toutes les forêts ont une orée, mais la vision est trompeuse. Car au lieu de champs et de pâturages à perte de vue, il déboule dans une clairière où coule un ruisseau, un lieu qui respire la joie et la gaieté. Etrange, car en même temps, c’est par son sourire et son enthousiasme que la personne suivante se rappelle à son esprit. Quoi qu’il fasse, le centaure ne parvient pas à l’imaginer autrement que riant, plaisantant, et répandant tel un mal bénin sa bonne humeur communicative, et il ne se rappelle pas un seul de ses mauvais jours qui n’aie résisté à une exposition trop prolongée à ce petit bout de femme. Âmes chagrines s’abstenir. Défaite inéluctable en perspective.
La végétation refait son apparition, mais point d’alignements. Ici, tout n’est que chaos, un beau bazar, un entrelacs de fougères, de buissons et d’arbres tordus disposés anarchiquement. Quel que soit le Dieu responsable de cet état de fait, il devait nécessairement être déjanté. Nouvelle tête. Nouveaux mots, surtout. Etrangement, aucun n’est sérieux. Même en cherchant, impossible de se rappeler une contribution constructive à une discussion, à un débat. En même temps, des esprits bien faits, le centaure en côtoie déjà suffisamment, celui-ci est la touche de folie qui harmonise le tout. Pourtant, on dit que derrière ce masque se cacherait un organisateur d’ambitieux projets…oui, on le dit, et c’est vrai. Encore une fois, les apparences trompent. Il ne s’y arrête pas. Sa course non plus. Elle continue.
Les bruits du galop ne peuvent tout masquer, surtout pas ces pas doux, délicats et discrets, mais toujours distincts. Un chat sauvage grimpe sur la première branche qu’il croise, et le toise, avec curiosité, pourquoi courir autant alors qu’une simple fuite en hauteur suffit ? Bonne question. Peut-être que le nouveau visage pourrait lui répondre ? Un joli minois félin, tantôt mutin et taquin, tantôt colérique, mais il sait que quant il l’est, c’est toujours pour le bien. Tout le monde ne peut se laisser guider par ses émotions, par sa passion, sauf ceux dont le cœur est d’or. Autorisation délivrée sans ambiguïté, des instincts aussi justes ne sauraient être négligés.
Curieusement, le chat le suit sur quelques branches, avant de se lasser et de retourner à de plus intéressantes occupations. L’anarchie reprend, moins exubérante, mais toujours présente, latente. Elle est toujours là, même si on ne la distingue pas. Intermittente. Le félin qui apparaît dans ses pensées est du même acabit. On ne le voit que rarement, mais jamais on n’oublie qu’il est là. C’est le propre des artistes que d’occuper continuellement les pensées des petites gens. Ils vivent dans leur monde, lui vit dans le sien, mais rien n’empêche ses visites d’être toujours agréables. Toujours là, même quand on ne le voit pas.
Si la mémoire du centaure ne le trahit pas, un village d’oreilles pointues doit se trouver non loin. Son trajet décrit un arc de cercle. Il les évite. Il fut un temps, cela aurait été par principe, mais il a appris à en connaître certains, certaines même dans ce cas. Lui qui voyait les elfes continuellement renfermés, a découvert une jeune fille pleine de vie et de bonne humeur, respirant l’enthousiasme, parfois aux frontières de l’exaltation. Et ses opinions bien tranchées se sont émoussées, ses préjugés se sont égarés, et il goûte avec bonheur l’amitié de la brunette – même s’il n’est pas son préféré.
Il aperçoit au loin les huttes sylvestres, et sait qu’au-dessus de sa tête, dix arcs et autant de flèches sont prêts à couper court à toute velléité agressive. Petit sourire. Ce doit être dans la pensée commune, que cette capacité à clore une situation de manière incisive. Celui vers lequel tend son esprit n’a pas son pareil pour rendre désuet un verbiage en quelques phrases bien senties, qualité rare et utilisée avec sagesse. Qui a dit qu’un long discours était nécessaire pour être convaincant ? Précision, concision, enrobées d’une belle dose d’humour, et le public est conquis.
Le rideau vert est franchi. Derrière, la nature envahissante, devant lui, la désolation, la mort. Et la mort peut-être belle, quand elle porte des reflets volcaniques rougeoyants. Une vision de l’enfer parmi tant d’autres, qu’il convient encore une fois de dépasser. N’est pas démon qui veut. Tiens, d’ailleurs…en voici un grand, terrifiant, à l’esprit pervers, prenant plaisir aux manipulations les plus horribles. Présence floue et indistincte, l’image se brouille, et forme…un cœur ? Bah. Le centaure imagine que son cerveau lui joue des tours. Une image si effrayante qui cacherait des trésors d’amour et d’humanité ? Difficile à croire, et pourtant…le cœur aussi est rouge. Fil d’Ariane qui mène vers une autre, qui l’attire et qui l’attache à lui. Les deux formes écarlates sont unies. Il secoue la tête. Qui l’eut cru ?
Les terres de feu laissent à leur tour place à une longue steppe ouverte sur l’horizon, le paradis de tout ce qui galope, de tout ce qui aime l’espace et la liberté. Ici, pas de contraintes, pas de lois, chacun fait ce qui lui plaît. Les paysages appellent des personnages. Toutes les centauresses ont du caractère, certaines en ont simplement encore plus que d’autres. Mais avec un regard aussi enflammé, qui aurait pu en douter ? Elle laisse libre cours à toutes ses émotions, c’est pour cela qu’elle est irremplaçable. Un esprit rieur dont les récits sont plus noirs que les ténèbres, ou plus légers qu’une plume. On appelle communément cela une perle.
Enfin, le centaure parvient au bout de sa chevauchée. Il est au centre de l’immensité, ou peu s’en faut. Il s’arrête, et se couche. Un lieu ouvert, sans limites. C’est ce qu’il lui fallait pour avoir une chance de correctement appréhender le dernier visage, celui qui manquait à sa galerie. Cheveux blancs mais yeux noirs, verbe d’or mais caractère d’acier, tant de contrastes devraient avoir du mal à s’accorder ! Pourtant, ils sont en parfaite harmonie, car même les steppes dans leur intégralité ne pourraient contenir le cœur qui les accorde. Etonnez-vous que tout le monde y succombe et veuille y trouver sa place d’une manière ou d’une autre !
La nuit tombe, la journée se finit. Il est loin de chez lui, pas un être vivant à des lieues. Pourtant, il sourit. Il n’est pas seul. Il ne sera jamais seul.

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