Montagne mon ennemie

J'ai froid...

Je me sens légère.
Mon corps ne pèse plus rien, mon esprit s'envole, mes yeux se ferment pour laisser mon imagination faire le reste.
La neige a été remplacée par un épais manteau d'herbe, bien épaisse, comme je l'aime. Je veux me rouler dedans, comme quand j'étais enfant. Sentir chaque brin chatouiller mon corps, caresser se tapis de verdure du revers de ma main...

Mais mon corps refuse ce que veut mon esprit. Il préfère s'élever au dessus du sol, lentement, presque au ralenti.

J'ai froid...

Je vole, oui, je vole. Mon corps flotte au dessus de ce tapis de verdure que j'adore tant et petit à petit, je m'en éloigne.
Le vent me porte à son aise, me guidant sur le chemin qu'il a l'habitude d'emprunter.
Je virevolte, je monte, je descend, j'effleure la cime d'un Chêne, je dépasse une hirondelle, je me sens légère.
Je vole comme dans un rêve.

J'ai froid...

Mais alors que je m'amuse avec un nuage, mon corps s'allourdit, sans prévenir. Je ne suis plus l'oiseau d'il y a quelques secondes, je ne vole plus... je tombe...
D'abord j'essaie de battre des bras, pour retrouver mon équilibre, mais je n'insiste pas, je vois bien que je tombe, je ne peux plus m'arrêter.
Je tombe.
Je regarde en bas, je n'ai pas le vertige ça va, et je vois la Montagne qui se rapproche, où est-ce moi qui me rapproche d'elle?
Peu importe, au final, le résulat sera le même, je vais finir en crèpe, ou pire encore, en compote.
Je chute... c'est long, mais je ne suis pas pressée de mourir, même si je dois me rendre à l'évidence que je suis en mauvaise posture.
Je me rapproche, doucement, mais surement, et je touche la pierre.
Je...

J'ai froid...

... me réveille.
Tout du moins, je reprend conscience.
J'ouvre un oeil, à moitié, je suis tétanisée.
Je suis toujours allongée sur le sol, recouverte de neige, la Tempête qui m'a prise pas surprise s'est acharnée on dirait.
Je ne vois plus mes mains, je ne les sens plus non plus, je suis toute blanche, c'est beau la Neige.

Je bouge un peu la tête, j'ai du mal.
Je regarde le chemin que j'ai emprunté plus tôt dans la journée, et je ne vois personne, je suis seule dans cet enfer blanc.
J'essaie de rester éveillée, si je me rendors, je suis perdue...

J'ai froid...

Qu'on vienne m'aider... quelqu'un...

Comme à son habitude, Nenya aimait se promener dans les montagnes le soir.
Attendant que la tempête se calme enfin, elle imaginait déjà marcher dans la neige fraiche et de laisser ses traces dans celle-ci.

Une fois la tempête calmée, elle sortit donc de la forteresse et se dirigea vers les montagnes qu'elle aimait tant.

Le paysage était magnifique, tout était calme et sans bruit. Un moment parfait pour réfléchir.

Arrivée au sommet, le regard de la jeune fille se posa sur un tas de neige plus haut que les autres. Pourtant elle, qui connait la montagne par coeur, savait qu'il n'y avait pas de rocher à cet endroit. Elle se dirigea donc vers cette bosse pour en connaître la cause, quand elle vit bouger quelques chose.

Elle s'approcha encore plus pres et observa avec attention cet endroit. Elle dégagea un peu de neige, et tomba nez à nez avec une jeune fille, sans doute perdu dans ces montagnes, et qui n'avait pas reussi à trouver un abris lors de la tempête.

Cette jeune fille grelottait, seulement à moitié conciente.

Nenya, enleva donc toute la neige du corps de la jeune fille, retira sa cape, et enveloppa l'inconnue dedant.

Tu n'as rien a craindre, je vais m'occuper de toi.
Je m'appelle Nenya, mais avant tout, il me faut de l'aide, je ne pense pas reussir à te porter jusqu'en bas toute seule.

Nenya jeta un coup d'oeil vers la forteresse, et entreprit d'aider la jeune fille à se lever.

Appuis-toi sur moi, je vais te sortir de là.

Encore un rêve?
Est-ce que je suis morte pour voir un ange fouler cette poudre blanche qui m'entoure?
Mais finalement, je ne crois pas, car j'ai toujours froid, c'est un signe qui ne trompe pas.

"Appuies-toi sur moi, je vais te sortir de là."

Elle me parle.
Que c'est bon d'entendre une voix après tout ce silence.
Elle veut m'aider, merci mon Dieu, tu ne m'as pas abandonné.
Je voudrais lui répondre, mais je n'y arrives pas.
Je remue la tête de haut en bas pour lui montrer mon accord, mais ce seul geste suffit à me faire vaciller.

Je me rattrape à elle comme je peux, j'espère que je ne lui fait pas mal.
Alors j'essaie de me tenir à peu près debout, c'est dur, j'espère que le chemin ne sera pas trop long.
Je voudrais lui sourire à défaut de parler, mais mes traits sont figés par le froid, il faudra attendre un peu avant que je ne puisse la remercier.

Je me retrouve bras-dessus bras-dessous avec elle et nous commençons à marcher, mais je ne sens plus mes pieds, je ne sens plus le sol non plus... A vrai dire je ne sais même pas si je marche avec elle ou si elle me porte complètement, je lui demanderais peut-être plus tard, si j'y pense.
Je suis collée à elle, elle me rechauffe un peu, que c'est bon.
J'entrouvre les lèvres et dans un murmure emporté par le vent, je semble souffler...

"Merci"