Mission diplomatique (suite)

Topic initial : https://ithrynluin.1fr1.net/viewtopic.forum?p=55844#55844

J’arpentais les longs couloirs au sol froid et aux murs couverts de lourdes tapisseries, les pas lourds résonnaient, surtout les miens ; l’ivresse n’aide pas à la discrétion…

Mais je retrouvais peu à peu mes esprits, conscient qu’une certaine tenue était de rigueur, que celle qui venait, porteuse d’un message, est à respecter.
Il y a déjà eu trop de massacres, le temps des trêves est peut-être arrivé…

***

Entre Gwenwyfar, et fait à ton aise. Que viens-tu faire ici, qu’elle est donc ce message que tu apportes ?

Je suis morte de fatigue, il se fait tard, j'ai fait un long voyage et pour finir la rencontre avec cet orc et la course à travers ces ruelles m'ont achevée.

Pourtant, voila le plus dur qui s'annonce, enfin c'est avec joie que j'accepte l'invitation de mon hôte et m'affale sur un des confortables sièges.

Messire, je serais directe, je suis venue ici en tant qu'ambassadrice des Amazones pour signer un pacte de non agression entre nos deux maisons.

Il ne semble pas surpris, intrigué, cela me rassure j'ai eu peur qu'il me rie au nez. Voila qui est encourageant et m'engage à poursuivre ma plaidoierie.

Depuis de nombreuses lunes déjà nous entretenons des liens étroits avec jadis les Itrhyn Luin et il semble que les relations avec votre Mesnie ne soient pas des plus mauvaises bien que les valeurs que nous défendions soient bien différentes.

Je sais bien que quand la chasse sauvage est lâchée elle n'a plus ni amis, ni ennemis et que même son veneur ne contrôle plus ses actes.

Déjà par le passé certaines armées en campagne qui avaient fait appel à son aide, l'avait amèrement regretté car leurs troupes avaient été décimées tout autant que celles de leurs ennemis.

Et pourtant me voila ici même en ces lieux, ce soir après avoir parcouru un long chemin afin de tenter de trouver une solution.

Elle s’installe et j’en fais autant. Une carafe remplie de vin, c’est dans l’ordre des choses, surtout ici.
Je remplie le verre que je lui tends.

Quand au mien, vidée deja et encore.

Mais, je n’ai plus cette ivresse.

Machinalement, je passe mon doigt sur le bord du verre de cristal, jouant un son plutôt désagréable.

Je ne peux pas te garantir ce traité…

J’ai remis mes fonctions entre les mains de nos plus délicieuses Hellequins : Aelis, la sorcière et Boadicea, la rôdeuse.
Mais je vais devoir tuer Boadicea…

La fin de ma phrase est ponctuée par un long silence. Mon regard se perd dans ce verre, dont j’usurpe cet affreuse musique, un long soupire douloureux et discordant.

Aelis va bientôt nous rejoindre. Sers-toi à boire.

Ce que je redoutais le plus arrive, il me tend un verre de vin que j'accepte machinalement mais je ne peux en boire sans rompre mon serment, je garde le verre et écoute attentivement ses paroles.

Il ne peut me garantir ce que je demande, je m'en doutais un peu mais je me devais d'essayer.

Mais il m'annoce que cette charge revient a Aelis, je me réjouis je vais revoir une de mes soeurs, c'est une Hellequin maintenant mais pour moi ce sera toujours une Amazone. Il me parle aussi de Boadicea que je n'avais que brièvement rencontré à l'époque des Itrhyn, et m'annonce froidement de manière anodine qu'il va devoir la tuer.

Il reste silencieux, moi aussi que dire...

Aelis va bientôt nous rejoindre. Sers-toi à boire.

Je repose le verre de vin auquel je n'ai pas touché sur le bureau. Savoir qu'Aelis va nous rejoindre me rassure. Même si jusqu'ici il a été bienveillant à mon égard, il m'inquiète.

Auriez vous par hasard quelquechose de non-alcoolisé, je ne peux boire d'alcool ?

Non mais ça va pas Arl? Arrête la bibine, tu fais n’importe quoi! Je vais t’apprendre à me traiter de sorcière, nonmého!

Une entrée fracassante, celle que je préfère. Souvent, mes entrées sont faites de charmes et de séduction. Là, il s’agit plutôt d’un plongeon hystérique accompagné de grognements. Une fois installée sur Arl, mon poing serré vient frotter énergiquement le haut de son crane.

Suis pas une sorcière!

Je ris de cette situation. Je savais Gwen mal à l’aise, ce verre de vin qu’elle ne pouvait porter à ses lèvres reposé le plus rapidement possible. Et je sentais aussi que le Arlequin avait le verbe mélancolique. Et ça, je ne pouvais pas laisser faire. Donc, j’ai décidé de modifier quelque peu l’ambiance.

J’arrête de torturer celui qui me sert de rehausseur sur le siège, m’asseyant bien droite sur ses genoux, calant mon dos sur son torse. Mes bras viennent se poser sur les accoudoirs, me donnant une posture de grande dame.

Très agréable, ce fauteuil !

J’accompagne cette phrase d’un petit mouvement du fessier, comme on le fait pour bien former un coussin aux contours de ses formes, un grand sourire sur le visage.

Alors, Gwen, que fais-tu par ici? Tiens, sers toi donc de ceci. Tu peux en boire les yeux fermés, sans risque pour ton serment. Je ne suis pas très polie, je devrais servir notre invitée, mais tu comprends, je suis tellement bien assise que je n’ose bouger!

L'arrivée d'Aelis allège considérablement l'ambiance, le pauvre Arlequin encore grisé n'a pas le remps de réagir face à la furie qui lui saute dessus et le martyrise gentiment.

A ma joie de la revoir s'ajoute le comique de la situation et je ne peux m'empêcher de rire et me risque alors à une plaisanterie.

Rhooo Aelis tu restes encore une Amazone pour traiter les mâles de la sorte, mais ton idée de fauteuil est intéressante.

Je me sers alors un verre du liquide qu'elle m'a indiqué et peut enfin me désaltéré.

Pour quelle raison je viens ici. Et bien tu sais que nos deux familles Amazones et Hellequins ont des liens très forts.

Néanmoins nos buts, nos valeurs et notre manière d'agir sont très différentes. Bien que nous nous respections et que nous n'ayons jamais eu maille à partir, un incident n'est pas à exclure.

C'est pourquoi je viens en ce jour pour, si je puis dire, en quelque sorte officialiser cette état de fait en vous proposant un pacte de non-agression.

J’écoute avec attention les paroles de Gwen. Il y a bien longtemps que je n’ai pas laissé mon esprit s’égarer dans mille endroits pendant que quelqu’un tentait de m’adresser la parole. Mais là, le respect que j’ai pour elle, ajouté aux souvenirs de l’époque où je réglais moi-même de telle mission, me font rester à l’écoute.

J’entends tes paroles, Gwen. Et je serai bien mal placée pour dire qu’il n’existe aucun lien entre nous. Mais hélas, je ne pourrai t’apporter la réponse que tu attends. Comprend moi, comprend nous. Le Faucheur réclame les âmes de tous. Imagine que l’une des Amazones perdent ses valeurs. Qui mieux que le Faucheur saura réveiller ses ardeurs quand Artémis sera affairé ailleurs?

Dans ma voix se mêle à l’unisson regrets et ambitions. Oui, j’aimerai leur promettre qu’elles sont à l’abri des chasses. Mais elles ne peuvent l’être, pour leur salut.

Tu auras peut être du mal à comprendre cela, mais je t’assure qu’il en est mieux ainsi, pour tous. De plus, certains Hellequins sont assoiffés, et rien ne pourra les arrêter. Par contre, vous n’avez rien à craindre de moi, sauf pour vos richesses! Et de lui non plus, à mon avis!

D’une main, je serre les joues d’Arlequin. Ses lèvres se plissent, formant un cul de poule tout fripé. Il s’est endormi, son verre à la main. Je dépose un baiser furtif sur ses lèvres, juste pour le plaisir de lui raconter quand il se réveillera, pour voir dans ces yeux le regard d’un gamin de cinq an qui a raté le passage du père Noël parce qu’il ne s’est pas réveillé à temps. Puis je replonge mon regard dans celui de Gwen.

Je suis désolée de te renvoyer porter une réponse négative dans la Cité des Amazones. Fais à toutes et à tous mes amitiés, je te prie.

Aelis me délivre alors le message que je redoutais, mais j'avoue que je m'y attendais. Je suis attristée bien sur, car même si je savais la mission difficile et quelquepeu perdue d'avance je conservais néanmoins un espoir, espoir qui vient de se volatiliser.

Ne t'inquiètes pas Aelis tu n'es pas responsable de la nature de ton clan et je comprends fort bien que tu ne puisses garantir la viabilité d'un pacte de non agression entre nos deux clans. Il vaut mieux ne pas avoir de traité du tout qu'un traité bancal.

Bien évidemment, tu n'as rien à craindre de nos soeurs et je leur transmettrais avec joie tes amitiés. Quand aux Hellequins, nous n'avons aucune inimitié avec eux et j'espère qu'ils ne nous donnerons pas motif d'en avoir.

Je me lève alors pour prendre congé de mes hôtes.

Je m'en vais porter la nouvelle à mes soeurs, je prierais Artémis pour que les relations entre nos deux clans restent des meilleures et qu'aucune Amazone ne croise la chasse sauvage lorsque celle-ci est déchainée.

J'étreins Aelis car je ne sais pas quand je la reverrais ni dans quelles circonstances, chaque séparation est une souffrance pour moi. Je me dégage et regarde Arlequin.

Transmets lui mes salutations et prends bien soin de lui.

Je franchis alors la porte les laissant tout les deux, me demandant quel tour elle allait lui jouer profitant de son sommeil.

Je vois dans ses yeux sa déception. Mais il ne pouvait en être autrement. Quand elle s’éloigne, prête à partir, je ne peux me résoudre à une telle fin.

Attends!

Je m’approche d’elle, et la serre à mon tour contre moi. Doucement, je lui glisse quelques mots à l’oreille.

La Mesnie ne peut vous promettre de vous éviter lors des chasses. Je ferai mon possible pour te transmettre les informations nécessaires pour que vous ne vous trouviez pas au mauvais endroit au mauvais moment…

Mes bras se relâchent, ils la laissent s’échapper, alors qu’ils voudraient la retenir encore un instant.

Allez, rejoint les Amazones, je vais m’occuper de lui maintenant!

Passer à autre chose, le plus rapidement possible, pour ne pas penser aux temps qui me sépareront d’elle, d’elles.